CONFORMITÉ RH

Agenda social 2022 du secteur privé

DeMarie-Clotilde Lefebvre
20 décembre 2021

Les 5 sujets à suivre

L’année 2021 est presque terminée et il faut déjà se tourner vers l’année 2022. Des sujets requièrent l’attention des entreprises, comme le nouveau forfait « télétravail » et « les titres -télétravail », le label pour l’emploi des salariés âgés de 50 ans et plus, de nouveaux groupes de travail paritaires sur la formation professionnelle et l’application du bonus-malus sur les contributions patronales chômage.

 

Télétravail

La proposition de loi visant à créer un titre-télétravail prévoit la mise en place d’un forfait annuel « télétravail » et la création de titres de paiement télétravail.

Ce texte donne la possibilité à l’employeur de prendre en charge tout ou partie des frais liés au télétravail sous la forme d’une allocation forfaitaire appelée « forfait télétravail ».  Les modalités de ce forfait seront précisées par décret. A ce jour, il est prévu que ce forfait soit facultatif et qu’il soit mis en place par accord collectif ou par décision unilatérale de l’employeur. L’accord ou la décision unilatérale devront prévoir le montant, les modalités, ainsi que les critères d’attribution de la prise en charge de ces frais.

Ce forfait serait exonéré de cotisations sociales et d’impôt dans la limite de 600€ par an et par salarié.

Il faut attendre la publication du décret pour connaître le détail des frais couverts par ce forfait. La question se pose de savoir comment ce forfait s’articulera avec les remboursements de frais déjà existant en matière de télétravail ?

 

Cette même proposition de loi prévoit que le règlement des frais engagés dans le cadre du télétravail pourra se faire via des « titres-télétravail ». Il s’agirait d’une solution de paiement spécifique, dématérialisée et prépayée, émise par une entreprise spécialisée. La proposition de loi précise que ces titres ne pourront être utiliser que pour le « règlement de biens ou de services spécifiques liés à l’exercice du télétravail des salariés (…) dans des conditions fixées par décret ». Là encore il faudra attendre la publication du décret pour connaître les dépenses éligibles à ces titres. On peut supposer que leur fonctionnement sera calqué sur celui des titres restaurant qui ne peuvent être utilisés que pour les repas des salariés (au restaurant ou lors de l’achat de certaines denrées alimentaires dans des commerces déterminés), dans ce cas, ces « titres-télétravail » ne devraient permettre de couvrir que les dépenses liées au télétravail (électricité, abonnement internet, rames de papier, cartouches d’encres…), reste à savoir quels commerces et le cas échéant quels fournisseurs d’électricité et d’internet accepteront ce type de titres.

 

Le texte est au début de son processus législatif et il devrait donc être voté définitivement courant 2022.  En attendant, des changements peuvent intervenir lors de la navette entre l’Assemblée Nationale et le sénat.

 

 

Emploi des seniors

La proposition de loi pour l’emploi des « travailleurs expérimentés jusqu’à la retraite » prévoit la création d’un label « 50+ » et renforce l’entretien professionnel à partir de 45 ans.

-      Label « 50+ » :  il a pour objectif de certifier le maintien dans l’emploi des salariés âgés de 50 ans et plus. Il permet de promouvoir et valoriser les bonnes pratiques en matière de recrutement, d’évolution professionnelle, de prévention de la désinsertion professionnelle ou de ressources humaines mises en place en faveur des personnes âgées de plus de 50 ans. Il sera mis en place dans toutes les entreprises sans condition d’effectif minimum. Ce label est uniquement « incitatif » et ne fera l’objet d’aucune sanction. Il sera délivré par le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) selon des modalités définies par arrêté. Ce label entrera en vigueur 6 mois après la promulgation de la loi, donc courant 2022.

-      Renforcement de l’entretien professionnel. A l’occasion de l’entretien professionnel qui suit le 45ème anniversaire du salarié, l’employeur devra aborder les perspectives de sa seconde partie de carrière. L’entretien aura pour objectif de favoriser l’évolution et l’adaptation des compétences du salarié et de sécuriser son parcours professionnel, ainsi que les modalités d’accès au conseil en évolution professionnelle.

Le texte a été adopté par l’Assemblée Nationale et a été transmis au sénat. Il n’est donc pas encore applicable, mais devrait entrer en vigueur dans le courant de l’année 2022.

 

Formation

Les partenaires sociaux se sont réunis au printemps 2021 pour évaluer l’impact sur les entreprises et les salariés des dispositions de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Suite à cette réunion, un accord-cadre national interprofessionnel sur la formation a été conclu le 14 octobre 2021. Le texte a été signé par trois organisations patronales (Medef, CPME et U2P) et trois organisations syndicales de salariés (CFDT, CFE-CGC, CFTC). Cet accord prévoit l’organisation de négociations sur 7 thèmes. Les travaux paritaires abordant ces thématiques doivent être engagés et finalisés sur le premier semestre 2022. La ministre du travail a annoncé le 18 novembre 2021 le lancement, dans les semaines à venir, de cinq groupes de travail techniques reprenant les 7 thématiques ci-dessous.

-      Encourager durablement le recours à l’alternance : l’objectif serait d’évaluer l’intérêt d’harmoniser les aides aux entreprises pour l’embauche de jeunes en contrat d’apprentissage et de professionnalisation. De son côté l’entourage de la ministre du travail indique qu’il est « nécessaire d’intégrer à tout cursus une évaluation préalable systématique, pour intégrer les compléments de formation utiles, avant d’accéder à l’apprentissage sur le modèle des prépas apprentissage ».

-      Professionnaliser l’utilisation du compte personnel de formation (CPF) et valoriser les nouvelles modalités de parcours : une expérimentation serait lancée avec la Caisse des dépôts et consignation (CDC) « pour conditionner l’achat de formations visant des certifications hors RNCP, à la validation de l’opérateur du conseil en évolution professionnelle (CEP) ». De plus, la ministre du travail a précisé qu’un groupe de travail technique sera mis en place sur les points d’amélioration technique des abondements du CPF sur le site mon compte formation, ainsi que sur la mise en place du « passeport compétences » que développe la CDC et qui vient répertorier les actions de formations suivies.

-      Faire du développement des compétences des salariés un enjeu stratégique pour les entreprises : les partenaires sociaux proposent d’accorder une aide aux entreprises qui engagent des dépenses de formation complémentaire à la contribution unique. Il est aussi prévu de publier un « vade-mecum paritaire » sur le développement des compétences, de l’alternance et des certifications. Des travaux devraient en outre être engagés autour de la clause de dédit-formation.

-      Simplifier et améliorer l’efficacité du système de certification au bénéfice des utilisateurs : des travaux seraient menés pour clarifier les notions de compétences, de qualification et de certification. Ils viseraient aussi à simplifier le processus de certification et de validation des acquis de l’expérience (VAE) et un guide méthodologique serait élaboré notamment à destination des Comités paritaires nationaux de l’emploi (CPNE).

-      Créer les conditions d’un pilotage éclairé de la formation professionnelle : les données utiles au pilotage national et régional de la formation professionnelle devraient être identifiées afin d’éclairer ce pilotage. L’entourage de la ministre du travail précise qu’il est « nécessaire d’améliorer le pilotage par la donnée de l’ensemble des politiques de formation. Pour ce faire, un groupe de travail technique rassemblera l’ensemble des acteurs disposant de données relatives à la formation. Il s’agit notamment de mieux comprendre et analyser les trajectoires des bénéficiaires, afin d’améliorer le pilotage des politiques mises en œuvre ».

-      Financer le système : les partenaires sociaux entendent définir une « méthode pluriannuelle de révision des coûts-contrats ». Le système de financement sera aussi « ré-envisagé » de manière globale, en prenant en compte l’ensemble des ressources et des financeurs. La ministre du travail a annoncé la création d’un groupe de travail technique qui sera chargé de définir une méthodologie de révision des coûts-contrats, en s’appuyant sur la comptabilité analytique des centres de formation d’apprentis (CFA). Il associera les partenaires sociaux, la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) et France compétences.

-      Poursuivre le chantier des transitions professionnelles (notamment intersectorielles) :les partenaires sociaux avaient avancé l’idée de mettre en place un crédit d’impôt pour les salariés qui engagent des dépenses de formation au-delà des fonds disponibles sur leur CPF, dans le cadre d’un projet de transition professionnelle. La ministre du travail a annoncé qu’un groupe de travail technique abordera les moyens à mettre en œuvre pour inciter à la formation et aux transitions professionnelles, y compris en mobilisant des outils fiscaux.

 

Subvention versée par les employeurs au profit de leurs salariés ayant recours à une solution de garde en crèche ou micro-crèche

Il s’agit d’une nouveauté introduite dans le bulletin officiel de sécurité sociale (BOSS) et qui entrera en vigueur au 1er janvier 2022. Ce dispositif permet d’accorder un nouvel avantage aux salariés, sans que cela ne coûte trop cher à l’entreprise. Il s’agit là d’un levier non-négligeable pour fidéliser les salariés. Il faut distinguer 3 situations :

  • L’employeur verse une subvention à la crèche ou micro-crèche permettant simplement de réserver une ou plusieurs places pour l’ensemble de ses salariés : l’avantage en nature est négligé (aucune cotisation n’est due). Attention, si cette subvention entraîne en outre un avantage tarifaire pour le salarié, seul l’avantage tarifaire rentre dans l’assiette des cotisations et contributions sociales.
  • L’employeur verse au salarié une indemnité mensuelle pour réduire les coûts de tarification de droit commun de la crèche ou de la micro-crèche : la part de cette indemnité qui excède 1 830 € par an et par salarié doit être réintégrée dans l’assiette de cotisations et contributions sociales.
  • L’employeur verse directement à la micro-crèche une participation financière qui a pour objectif de réduire le tarif pratiqué par la micro-crèche. Lorsque le salarié bénéficie d’un tarif négocié par son employeur ou le comité social et économique (CSE) et dont le montant est inférieur au barème défini par le gestionnaire pour les parents ne bénéficiant pas d’une place réservée par leur employeur ou le CSE de leur entreprise, il s’agit d’une aide financière assimilable à un élément de rémunération. L’avantage individualisé correspond alors à la fraction de la subvention de réservation, qui couvre la différence entre le tarif normalement appliqué par la micro-crèche et le tarif dont bénéficie le salarié de l’entreprise réservataire. Cet avantage individualisé est exclu de l’assiette de cotisations et contributions sociales dans la limite de 1 830 € par an et par salarié. La fraction de l’avantage qui excède cette limite doit être réintégrée dans l’assiette de cotisations et contributions sociales.

 


Bonus-Malus sur les contributions chômage

Le décret du 26 juillet 2019 a prévu la mise en place d’un bonus-malus sur les contributions patronales d’assurance chômage. Celui-ci concerne les employeurs de 11 salariés et plus appartenant à l’un des secteurs d’activité suivant :

 

    • Fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac.
    • Production et distribution d'eau, assainissement, gestion des déchets et dépollution.
    • Autres activités spécialisées, scientifiques et techniques.
    • Hébergement et restauration.
    • Transports et entreposage.
    • Fabrication de produits en caoutchouc et en plastique, ainsi que d'autres produits minéraux non métalliques.
    • Travail du bois, industries du papier et imprimerie.

       

      Le bonus-malus est basé sur une comparaison entre le taux de séparation de l’entreprise et le taux de séparation médian calculé dans le secteur d’activité de l’entreprise. Si le taux de séparation de l’entreprise dépasse le taux de séparation médian du secteur d’activité, l’entreprise se verra appliquer un malus sur son taux de cotisation patronale chômage. A l’inverse, si le taux de séparation de l’entreprise est inférieur au taux de séparation médian du secteur d’activité, l’entreprise se verra appliquer un bonus.

       

      Le taux de séparation de l’entreprise (appartenant à l’un de ces secteurs) est calculé sur la période 1er juillet 2021-30 juin 2022 en prenant en compte toutes les fins de contrat de travail à l’exception :

    • Des démissions.
    • Des fins de contrat de mission.
    • Des fins de contrat d'apprentissage.
    • Des fins de contrat de professionnalisation.
    • Des fins de contrat de travail à durée déterminée destinés à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi, ou des fins de contrats de mise à disposition liés à un contrat de mission d’insertion professionnelle.
    • Des fins de contrat unique d'insertion.
    • Des fins de contrat de travail ou des fins de contrat de mise à disposition conclus avec une structure d'insertion par l'activité économique.

     

    Les premières majorations ou bonifications du taux de cotisation patronale chômage s’appliqueront à partir du 1er septembre 2022, jusqu’au 31 octobre 2022. Cette courte période d’application s’explique par le fait que le décret relatif à cette réglementation s’applique jusqu’au 1er novembre 2022. Un nouveau décret devra donc prendre le relais pour pouvoir aller au-delà du 1 er novembre 2022. A surveiller donc….

     

     

     

Marie-Clotilde Lefebvre
Veille légale – Juriste en droit social chez Sopra HR
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