TENDANCES RH

Entreprise connectée et dématérialisée : le DRH à la manœuvre

DeVéronique Montamat
12 mars 2020

Économie, industrie, communication, éducation… On le sait, la révolution numérique impacte aujourd’hui la majorité des secteurs d’activité. Elle a bousculé nos vies, nos sociétés et nos méthodes de travail. Elle est désormais un axe stratégique pour les entreprises qui, face à cette vague digitale, n’ont d’autres choix que de repenser leur modèle opérationnel. Une dynamique de transformation qui n’épargne pas la fonction RH, bien au contraire.

Grâce au numérique, la fonction RH est en effet devenue plus performante. IA, big data, ou encore blockchain, sont autant de solutions qui ouvrent de nouvelles perspectives et facilitent la transition vers des RH dit ‘augmentées’.

Mais face à ces nouveaux modèles, quel rôle et quelle place pour la DRH ? Comment accompagner la transition et encadrer l’utilisation des nouvelles technologies au sein de l’entreprise ?

Un premier constat, la technologie a nettement amélioré la productivité des RH

Toutes les grandes évolutions technologiques ont permis d’augmenter la productivité de l’Homme et il s’agit là du principal bénéfice attendu de la transformation digitale de la fonction RH. En 2020 ce sont ainsi 57% des DRH qui attendent une amélioration de la performance de la fonction RH grâce au digital.[1] La dématérialisation des processus a été une première étape vers des RH augmentées et le ‘zéro papier’ qui ont permis d’instaurer plus d’agilité et d’efficacité.

Par ailleurs, une approche ‘machine to machine’ a prouvé son efficacité et s’étend désormais à certains processus externes aux entreprises. En témoigne l’entrée en vigueur de la Déclaration Sociale Nominative (DSN), obligatoire depuis janvier 2017. Grâce à une transmission mensuelle unique et dématérialisée des données, ce dispositif a permis de simplifier les processus de déclaration auxquels sont soumises les entreprises. Déchargés de ce type de tâches administratives chronophages, les DRH peuvent ainsi mobiliser davantage de ressources vers des missions plus stratégiques et revenir à l’essentiel de leur profession : la gestion de l’humain au sein de l’entreprise.

Rapprocher les RH des collaborateurs : un enjeu qu’il convient cependant d’encadrer

Selon la 3e édition du baromètre « Radioscopie des DRH » publiée en avril 2019 par l’Observatoire Cegos, 34% des salariés interrogés reprochent aux DRH l’insuffisante prise en compte du facteur humain et 25% le manque de proximité. Des plateformes de santé et bien-être au travail aux outils de mesure d’humeur des salariés, de nombreux services RH sont désormais disponibles en ligne, pour apporter des nouvelles réponses aux besoins d’accompagnement et de proximité exprimés par les salariés.

Cependant, ces innovations peuvent entraîner certaines formes de dérive et d’intrusion dans la vie personnelle des collaborateurs. Depuis 2017, huit salariés volontaires de la société Newsfusion en Belgique ont accepté de se faire greffer des puces électroniques sous la peau, suscitant l’inquiétude de défenseurs des droits de l’homme.

En l’absence de cadre législatif, comment encadrer ces nouvelles pratiques RH ? En facilitant ou interdisant l’implantation de certains dispositifs, le ‘DRH 3.0’ n’a d’autre choix que d’intégrer des valeurs et principes éthiques à la gestion des RH augmentée.

L’entreprise à l’épreuve de la dématérialisation

L’émergence de la Digital Workplace a conduit à une forme de distanciation des collaborateurs vis-à-vis de l’espace de travail. Le travail flexible et délocalisé devient progressivement la norme. L’entreprise étendue, une réalité.  Une question demeure : comment faire vivre la culture d’entreprise au sein d’un espace désormais plus virtuel ?

L’intégration d’outils collaboratifs, de solutions de partage de documents ou d’informations, mais aussi des processus RH représentent des solutions tangibles. Au cœur de cet espace de travail éclaté, il incombe au DRH de définir la manière d’incarner la culture, les valeurs de l’entreprise et la manière d’animer un collectif d’hommes et de femmes distants. Pour le DRH c’est avant tout une opportunité d’élargir son champ d’action pour ne plus gérer uniquement les salariés de son entreprise, mais bien l’ensemble des individus non-salariés, travailleurs freelance ou intérimaires, qui participent à son succès. Le DRH doit aujourd’hui être à l’origine de nouveaux dispositifs pour répondre aux besoins de tous les contributeurs de l’entreprise étendue.

Anticiper mieux grâce à la technologie

Les technologies d’Intelligence artificielle alliées au Big Data peuvent aujourd’hui être utilisés afin d’identifier certains schémas comportementaux et ainsi prédire des risques psychosociaux. Depuis plusieurs années, la police de la ville de Chicago utilise l’analyse de big data dans le cadre de programmes de police prédictive et ce dans une logique de prévention et d’anticipation des risques. Dans une même logique, développer l’analyse de données dans la sphère RH pourrait permettre aux DRH d’anticiper des risques psychosociaux au sein de l’entreprise, mais aussi des risques d’accident du travail, ou des facteurs de turnover.

Un regard éthique doit cependant être porté sur ces nouvelles pratiques. Grâce au RGPD, la gestion des données, en particulier dans les RH, est certes plus encadrée. Néanmoins, alors que les entreprises sont aujourd’hui seules responsables de leurs chartes numériques, la DRH doit être capable de comprendre et, dans une certaine mesure, de maîtriser les algorithmes des Intelligences Artificielles afin d’en assurer la transparence et la dimension éthique.

Devenir acteur de la transformation digitale, tout en étant le garant de l’éthique numérique des entreprises, tel est le défi qui attend les DRH de demain. Il leur incombe désormais de prendre du recul et de se poser les bonnes questions face aux nouvelles technologies et à la course au disruptif. Cela doit passer notamment par une plus ample maîtrise et connaissance des outils et des enjeux du numérique. Pour accompagner ce mouvement, il devient urgent que toutes les parties prenantes, pouvoirs publics et partenaires sociaux, s’engagent en faveur d’un cadre réglementaire de l’entreprise numérique.

[1] Source : « Le Digital RH : Réalités et Challenges – 2020 », étude réalisée par Sopra HR Software et L’Usine Digitale, du 25 novembre au 29 décembre 2019 auprès de 253 décideurs RH.

Article à voir également sur le site Focus RH : https://www.focusrh.com/tribunes/entreprise-connectee-et-dematerialisee-le-drh-la-manoeuvre-par-veronique-montamat-32774.html

Véronique Montamat
Directrice Marketing et Prospective RH chez Sopra HR
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